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Photo du rédacteurAdrien Corbeel

Gladiator II, une suite boursouflée et confuse

Gladiator II de Ridley Scott
©Warner Bros

Dire de Gladiator II qu'il porte sur ses épaules certaines attentes laissées par le précédent volet relève presque de l'euphémisme. À ce stade-là, ce n'est plus un héritage, c'est un fardeau, un sacerdoce. Comment faire suite à un film, qui a remporté de multiples Oscars, propulsé au firmament la carrière de sa star et ressuscité (pour un temps) un genre cinématographique devenu moribond ? La tâche paraissait d'autant plus compliquée que la fin du premier long-métrage, avec la mort/victoire de Maximus, n'appelait pas forcément à une suite. Ce qui explique peut-être pourquoi il a fallu attendre 24 ans avant de voir Ridley Scott renouer avec la Rome Antique.


Pour répondre aux énormes attentes du public, le cinéaste semble dans un premier temps prendre la direction la plus évidente et la moins risquée : reprendre, littéralement, l'intrigue du Gladiator de 2000. On retrouve donc un héros enveuvé, réduit en esclavage, assoiffé de vengeance, et qui par ses victoires dans l'arène des gladiateurs met à mal le pouvoir des empereurs (ils sont deux ici). Héros qui, évidemment, se trouve être le fils caché de Maximus, exilé de Rome après la mort de son père.

Gladiator II de Ridley Scott
©Warner Bros

C'est au talentueux Paul Mescal qu'incombe la tâche de succéder à Russell Crowe – une passation du glaive à laquelle il ne se montre malheureusement pas à la hauteur. Si l'acteur irlandais a séduit le public grâce à ses performances vulnérables dans Aftersun et Normal People, il ne dégage pas le charisme nécessaire pour jouer le protagoniste d'un Gladiator, en souffre de la comparaison avec Crowe. Il faut dire que l'écriture de son personnage n'est guère à son avantage, le scénario de David Scarpa (déjà à l'œuvre sur Napoléon) lui donnant des motivations confuses qui s'effondrent à la moitié du récit, là où le premier film brillait par sa clarté narrative.


Face à une œuvre aussi peu originale dans sa démarche, et aussi maladroite dans sa construction, la question se pose et se repose : quel intérêt y a-t-il à un Gladiator II ? En faire plus est une de rares raisons d'être de cette suite boursouflée : plus de personnages, plus d'intrigues, et surtout plus de scènes d'arène « épiques ». Vous avez sans doute déjà aperçu quelques images pendant la promotion du film : le Colisée rempli d'eau et de requins pour une bataille navale, un rhinocéros attaquant Paul Mescal… Ces scènes sont plutôt amusantes et grandioses, mais dégagent quelque chose d'assez artificiel. Le film a beau critiquer à de multiples reprises la politique du pain et des jeux, il l'emploie lui aussi, ensevelissant nos sens sous un spectacle brutal.

Gladiator II de Ridley Scott
©Paramount Pictures

Gladiator II, c'est aussi plus de chaos, dans l'écriture bien sûr, mais aussi dans les rues de Rome, où sévit notamment Macrinus. Malgré ses multiples monologues, je serais bien incapable de vous expliquer l'objectif final de ce personnage manipulateur, joué avec générosité par Denzel Washington. Mais ça fait partie de son charme. Sa manière de semer le chaos à travers Rome n'est pas sans rappeler le Joker incarné par Heath Ledger dans The Dark Knight. C'est grâce à lui que Gladiator II s'échappe quelque peu de l'intrigue de son prédécesseur. 


À côté de celle de Washington, les performances de Pedro Pascal et Connie Nielsen, correctes, mais très sérieuses et peu inspirées, paraissent bien fades. En frères empereurs décadents, Joseph Quinn et Fred Hechinger sont quant à eux plutôt amusants, les deux acteurs cherchant à évoquer chacun à sa manière l’empereur Commode que jouait Joaquin Phoenix. Une citation du premier film parmi tant d'autres. On ne compte plus les « Force et Honneur », scandés avec tant de sincérité et de pomposité. 


Pour un film qui clame dans ses derniers instants vouloir faire table rase du passé, Gladiator II en semble absolument incapable. Pire, il apparaît complètement déconnecté du présent, comme en témoigne le traitement de ses personnages féminins, relégués au second plan des démonstrations viriles et testostéronées – argument de vente principal de cette suite. 



RÉALISÉ PAR : RIDLEY SCOTT

AVEC : PAUL MESCAL, DENZEL WASHINGTON, PEDRO PASCAL

DURÉE : 148 MINUTES

PAYS : ÉTATS-UNIS

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