Tron Arès : Une suite inoffensive
- Arthur Bouet
- 8 oct.
- 2 min de lecture

« Y a-t-il un cœur dans la machine ? » La question est vieille comme la science-fiction et parcourt l’histoire du cinéma, de 2001, l’Odyssée de l’espace (1968) à Ex Machina (2014), en passant par Blade Runner (1982). Cette rengaine est aussi au cœur de Tron : Ares, nouvelle itération d’une étrange franchise démarrée en 1982 par un film révolutionnaire en matière d’effets spéciaux et devenu culte, confirmée par Tron : L’Héritage en 2011, lui-aussi entré au panthéon de la pop culture. Intelligence artificielle contrôlée par un diabolique magnat de la tech, Ares est programmé pour dérober une technologie permettant de modéliser des données informatiques dans notre monde physique. Mais en affrontant la dirigeante de l’entreprise concurrente, ce logiciel fait la découverte d’émotions humaines telles que l’empathie, le chagrin, et sent poindre en lui le début d’une conscience.

Il est ironique que cette sempiternelle histoire de lutte entre l’humain et la machine émane des studios Disney, parangon du divertissement techno-industriel absorbant les œuvres originales les unes après les autres pour les recracher en produits dévitalisés à destination des masses. Sans surprise, la critique du grand méchant technocrate verse dans une caricature si grossière qu’elle en perd toute charge subversive, et le vertige métaphysique promis par l’humanisation de l’I.A. n’advient jamais, liquidée en quelques lignes de dialogue au ras des pâquerettes. Certes, il aurait sans doute été naïf d’en attendre autre chose, mais fut un temps où les blockbusters les plus calibrés étaient subvertis de l’intérieur par des réalisateurs contrebandiers, jouant la mise en scène contre le scénario (Starship Troopers de Paul Verhoeven en étant peut-être l’exemple le plus criant). La musique esquissait pourtant une piste intéressante : à l’EDM techno-optimiste des Daft Punk succède la synth-pop froide et dystopique de Trent Reznor et Atticus Ross, princes de la bande originale prestige, signée ici sous bannière Nine Inch Nails. Il aurait fallu un cinéaste particulièrement doué pour s’engouffrer dans cette brèche dépressive et en étendre l’humeur à l’ensemble du métrage. Mais Joachim Rønning, faiseur abonné aux sequels morts-vivants (Maléfique : Le Pouvoir du mal, Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar), ne se contente que d’une mise en boîte correcte de séquences prévisualisées par une armada d’artistes VFX, et achève de faire ce Tron troisième du nom un film parfaitement inoffensif.



