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Dossier : Top 6 films fantastiques français

L'équipe de Surimpressions

Le cinéma français est un des cinémas les plus réputés dans le monde mais on ne peut pas dire qu'il soit particulièrement célèbre pour ses incursions dans le fantastique. À raison ? La sortie imminente du Règne Animal de Thomas Cailley a donné envie à Surimpressions de revenir sur six autres films de genre français à (re)découvrir !


© O'Brother Distribution

Les Yeux sans visage - George Franju (1956)

-Julien-


Pour tenter de soigner sa fille violemment défigurée lors d’un accident de la route, un brillant chirurgien enlève des jeunes femmes et tente de prélever leur visage.


© Champs-Elysées Productions

L’arrivée de George Franju dans le paysage cinématographique français des années 50 fut un vrai bouleversement. D’où venait donc ce cinéaste aux ambitions macabres, à mi-chemin entre le suspens, le conte et un nouveau genre d’horreur ? Encore aujourd’hui, Les Yeux sans visage fascine et désarçonne. D’abord pour sa narration, qui cultive le mystère avec un rare savoir-faire, dévoilant son intrigue avec parcimonie au moyen d'ellipses étonnantes. Ensuite, par son approche de l’épouvante : à l’époque, il faut rappeler que le genre horrifique était dominé par la méthode de Jacques Tourneur, qui privilégiait la suggestion et le hors-champ. Tout le contraire de Franju, qui fait plein cadre sur l’opération chirurgicale et n’épargne aucun coup de scalpel aux spectateurs. Cette frontalité, renforcée par des effets spéciaux saisissants, préfigurait l’avènement d'une horreur qui allait prendre ses quartiers dans les années 60 : le gore.



La Cité des enfants perdus - Jean-Pierre Jeunet & Marc Caro (1995)

-Thibault-


Denrée, le petit frère de Miette, est enlevé par de mystérieux cyclopes. La petite orpheline se lance à sa recherche, avec l’aide du géant One, une quête qui finira par la conduire dans la base du savant Krank.


© Studio Canal

Grand classique du cinéma fantastique francophone, La Cité des enfants perdus est le deuxième long-métrage réalisé en collaboration par Marc Caro et Jean-Pierre Jeunet. Conte sombre, influencé par une esthétique steampunk, il explore l’importance des liens familiaux et le pouvoir des rêves. Ce sont évidemment les décors et l’univers global du long-métrage qui le rendent si remarquable : le dépaysement est total, les couleurs marquées, les environnements à la fois extraordinaires et tangibles. Arrivant juste après Delicatessen (qui aurait également dû faire partie de ce top) des mêmes réalisateurs, il a une autre ambition : nous perdre dans un imaginaire total. Pari tenu. Sa galerie de personnages est, comme souvent chez Jeunet, mémorable ; on se rappellera en particulier les performances de Ron Perlman en haltérophile au grand cœur et de Dominique Pinon dans le rôle des clones otages et fantasques.



Haute tension - Alexandre Aja (2003)

-Julien-


Alors qu’elles passaient des vacances à la campagne, deux jeunes femmes sont soudainement prises en chasse par un camionneur fou.


© Europa Corp

Le moins que l’on puisse dire sur Haute tension, c’est que son titre n’est pas mensonger ! À travers un pitch simple, voire simpliste, le jeune Alexandre Aja - 25 ans à l’époque - déploie un savoir-faire remarquable dans la gestion du suspens. Personnages caractérisés en quelques scènes à peine, tueur d’autant plus effrayant qu’il est dépourvu de psychologie, effets gores réalisés sur le tournage : tout dans Haute tension respire l’efficacité et la volonté de maximiser l’adrénaline. On sent que le cinéaste a été dans une bonne école et les références aux classiques du genre sont légion. Ainsi, la camionnette rouillée du tueur rappelle Duel de Steven Spielberg tandis que le contexte rural et la violence poisseuse convoquent davantage le modèle de Massacre à la tronçonneuse. Le twist final - que l’on ne révélera pas ici - malin et inattendu, termine de faire d’Haute tension l’exemple du parfait petit slasher à découvrir un soir pluvieux.




Grave - Julia Ducournau (2017)

-Julien-


Végétarienne depuis la petite enfance, Justine voit soudainement se réveiller des instincts cannibales, alors qu’elle goûte à la viande pour la première fois lors d’un baptême universitaire.

© O'Brother Distribution

Peu de films de genre ont réussi à synthétiser avec autant d’acuité les thèmes de leur époque : végétarisme, émancipation féminine, déterminisme, homosexualité, violence animale, etc. Pour son premier long-métrage, Julia Ducournau fait preuve d’autant d’ambition que de fougue et va articuler tous ces motifs à la faveur d’un récit à la tonalité protéiforme et aux coups d'éclat formels impressionnants. Parfois grotesque, souvent drôle, toujours viscéral, le long-métrage porte une identité forte et transcende perpétuellement son intrigue de teen-movie. Car derrière sa force de frappe esthétique, le film nous raconte avant tout la triple initiation de son héroïne Justine : scolaire, amoureuse et cannibale. En fusionnant ces trajectoires avec une telle fluidité, Ducournau donne sa vision tourmentée de la quête identitaire et de l’affirmation de soi. Déjà un classique ?


High Life - Claire Denis (2018)

-Thibault-


Un groupe de condamnés est envoyé dans le fin fond de l’espace pour mener des expériences mystérieuses… sans espoir de retour.


© Imagine

Claire Denis signe avec High Life une très étrange (dé)aventure spatiale, une errance sans origine, ni but. Comme souvent chez elle, ses personnages sont des corps qui interagissent dans le désir et la violence, dont le contexte importe finalement peu. On retrouve certes dans le film quelques thèmes classiques de ce qu’on pourrait appeler la « high SF », dans le sillon de 2001, l’Odyssée de l’espace ou d’Ad Astra : un discours symbolique sur les limites de l’humanité, sur l’incompréhensible et l’incommensurable, une étrangeté frôlant la métaphysique. Mais ce qui intéresse la cinéaste c’est d’abord le huis clos dans lequel une bande humaine (qui ressemble fortement à un groupe de souris en laboratoire) va s’autodétruire, s’aimer, se grignoter. Monte, interprété par un Robert Pattinson ambigu à souhait alors en plein virage dans sa carrière, accompagne le public jusqu’à la fin. Peut-être bien que le destin des passagers du vaisseau-suicide de High Life ne représente pas autre chose que… l’humanité tout entière.


Jumbo - Zoé Wittock (2020)

-Thibault-


Jeanne, la vingtaine et introvertie, travaille dans un parc d'attractions où elle va développer une relation très spéciale avec l’un des manèges…


© Rezo Films

Histoire d’amour fantastique, drame sur le rejet de la différence, trip halluciné technophile… Jumbo est un peu tout ça. Le film de Zoé Wittock a déchiré le ciel du cinéma belge comme une petite comète : explorant des territoires nouveaux et osant osciller entre une esthétique réaliste froide et des moments de grâces (rêves ? fantasmes ? merveilleux ?) très stylisés. Les jeux visuels sur les fluides noires font évidemment penser au Under the Skin de Jonathan Glazer mais c’est ici une autre histoire de l’altérité et du rapport aux autres qui est racontée. Jeanne ne sait pas se lier aux autres (êtres humains) et vit dans sa relation au manège quelque chose d’extraordinaire et qui la dépasse – le parallèle que met en place la cinéaste entre le sexe hétérosexuel et les scènes symboliques avec la machine ne sont pas flatteuses pour la chair et le sang. Noémie Merlant livre une superbe performance avec le personnage de Jeanne, autant dans ses phases autistiques qu’à travers l’exaltation de ses tours de manège.



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