Islands : le thriller psychologique à ne pas manquer cet été !
- Julien Del Percio
- il y a 11 heures
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Sur une plage paradisiaque, Tom s’éveille lentement, la mine hagarde, le corps meurtri par une énième cuite. Modeste coach de tennis dans un luxueux resort all-inclusive, le personnage interprété par Sam Riley erre comme un spectre, sans objectif, sans impulsion, si ce n’est occuper l’espace, et pourquoi pas sniffer une trace quand l’occasion se présente ou coucher avec l’une ou l’autre fille rencontrée au gré de ses innombrables virées nocturnes. Les touristes cinquantenaires résidant à l'hôtel lui envient cette existence dépourvue d’attaches, entièrement dédiée aux plaisirs, à la flânerie et aux excès. “Pour vous, c’est les vacances toute l’année” lui lance-t-on, entre deux bières. Tom acquiesce, mais dans son regard lointain, on lit les regrets d’une trajectoire autre, plus stable, plus responsable. Celle de monsieur tout le monde.
Lorsqu’il rencontre Dave (Jack Farthing), un autre de ces vacanciers bourgeois et capricieux, c’est comme s’il se confrontait à son exacte antithèse. Piètre amant et géniteur irresponsable, il semble traîner sa femme Anne (Stacy Martin) et son fils Anton (Dylan Torrell) comme deux boulets dont il rêverait de s’émanciper. Tandis que Tom s’attire progressivement les amitiés de ce foyer mal assorti - et en particulier de l’énigmatique Anne - la disparition inexplicable de Dave va doucement faire basculer son petit monde…

Cinéaste méconnu, voire sans doute un peu sous-estimé, l’allemand Jan-Ole Gerster s’était illustré dans ses deux précédents films A Coffee in Berlin et Lara Jenkins par l’indéniable finesse psychologique de ses portraits. C’est encore une fois la qualité principale de ce Islands, dont le postulat proche du thriller tient davantage de la fausse-piste - malgré son grand prix au festival Reims Polar. Si l’évanouissement de Dave occasionne bel et bien une investigation et que celle-ci amène son lot de scènes réussies - dont un interrogatoire révélateur mené par un inspecteur chevronné - le film puise davantage sa force dans le parcours existentiel de son trio de personnages. Anne est-elle affectée ou satisfaite de cette disparition ? Dave s’est-il réellement suicidé ? Tom va-t-il tout bonnement le remplacer dans son rôle de père et de mari ? Entre reconstruction et effondrement, Jan-Ole Gerster marche sur un fil ténu et parvient à créer un insidieux trouble.
Suivant l’exemple d’Antonioni (Blow up, L’Avventura), Islands a l’intelligence de ne pas lever le voile sur tous les mystères de son intrigue, au point que son dénouement pourra décontenancer une partie du public. C’est pourtant précisément dans cet état de flottement que se loge toute la singularité du projet : entre la mer azurée et un soleil de plomb, les personnages expérimentent, le temps d’une étonnante parenthèse, les potentialités d’un autre rôle, d’une autre vie.
Réalisé par Jan-Ole Gerster (Allemagne - 123 minutes) avec Sam Riley, Stacy Martin, Jack Farthing.