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Flashback : Rendez-vous, un petit miracle de comédie romantique

Sommet de la comédie romantique hollywoodienne, Rendez-vous pourrait bien constituer le remède parfait pour quiconque est allergique à la niaiserie un peu trop dégoulinante de ce sous-genre très américain qu’est le film de Noël.


© Metro-Goldwyn-Mayer
© Metro-Goldwyn-Mayer

Lorsque l’on associe James Stewart et Noël, on pense forcément à La Vie est belle, conte intemporel et merveilleux de Frank Capra. Pourtant, six ans auparavant, un autre film réunissait l’acteur et la fête préférée des Américains : Rendez-vous, réalisé par Ernst Lubitsch. Une comédie romantique, qui du propre aveu du cinéaste, constitue son œuvre favorite parmi sa filmographie. Un choix plus étonnant qu’il n’y paraît, dans la mesure où le film est sans doute l’un des moins “lubitschéen” dans sa tonalité : moins cynique, moins cruel dans sa description des rapports humains, le long-métrage se montre presque philanthrope, et se rapproche de fait du cinéma de son contemporain Capra.


Peut-être est-ce dû à son cadre, auquel fait référence le titre original du film - The Shop around the corner, que l’on pourrait traduire par “le magasin du coin”. Ici, pas de haute société bourgeoise à écorner ni d’arnaqueurs professionnels comme dans Haute pègre, mais des employé·es modestes d’une maroquinerie, effrayé·es par les fins de mois et les humeurs aléatoires de leur patron. Peut-être, aussi, est-ce lié à la délocalisation de l’intrigue à Budapest, qui donne de suite au film quelque chose de moins luxueux, de moins artificiel, que les grands appartements new-yorkais qui jalonnent la filmographie du cinéaste d’origine allemande. 


© Metro-Goldwyn-Mayer
© Metro-Goldwyn-Mayer

Dans tous les cas, le petit miracle de comédie romantique que représente Rendez-vous doit beaucoup à son pitch savoureux : Alfred Kralik (James Stewart) et Klara Novak (Margaret Sullavan), collègues dans le négoce de M. Matuschek, se vouent mutuellement une haine tenace. Pourtant, tous les soirs, Alfred entretient une correspondance poétique avec une inconnue, dont il est éperdument sous le charme…Une femme qui se révèle être sa détestée collègue. Évidemment. 


Un principe succulent sur le papier, largement transcendé à l’écran par le savoir-faire de Lubitsch. Le cinéaste élève ainsi son récit de quiproquos à l’aide d’une écriture d’une nonchalance et d’un raffinement dont il détient le secret (la fameuse “Lubitsch’s touch”), évitant constamment de sombrer dans la niaiserie - comme le fera le remake, Vous avez un message avec Tom Hanks et Meg Ryan. Pourtant, de bons sentiments, le film n’en manque pas, notamment à travers des personnages secondaires - tous excellents - et ce patron, qui s’assure que chacun·e de ses employé·es n’est pas seul pour Noël, éprouvant secrètement le désir d’être invité. Mais Rendez-vous atteint son sommet dans son climax, qui démêle finalement le quiproquo, alors qu’Alfred a compris depuis un moment déjà que Klara Novak et sa belle inconnue ne constituaient qu’une seule et même personne. Là, dans cette confession à la troisième personne, sans musique, sans déplacements de caméra excessifs, avec le jeu des comédiens et le texte comme outils principaux, Lubitsch délivre un fragment de pure grâce cinématographique.


Avec Margaret Sullavan, James Stewart, Frank Morgan, Joseph Schildkraut. états-unis, 99 minutes. Disponible en VOD, DVD et Blu-ray. 

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