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Trois kilomètres jusqu'à la fin du monde : un film tranchant et implacable

Trois kilomètres jusqu'à la fin du monde, d'Emmanuel Parvu
© September Film

La fin du monde, c’est le delta du Danube ; terre enclavée, luxuriante, à la fois solitaire et paradisiaque. Une côte de la mer Noire qui ressemble à la Méditerranée. La fin du monde c’est aussi le jeune Adi (Ciprian Chiujdea) qu’on a tabassé un soir et dont les parents découvrent subitement l’homosexualité. Pour ce couple croyant et traditionaliste, il est moins important de punir les coupables que de dissimuler la vérité et d’essayer de « guérir » leur fils.


Le cinéaste Emanuel Pârvu s’inscrit dans la droite lignée de la Nouvelle vague roumaine et de grands noms comme Cristian Mungiu ou Cristi Pui. Il privilégie les plans fixes, souvent longs et composés avec soin : chaque déplacement de ses comédien·nes est minutieusement chorégraphié La caméra ne bouge que lorsque c’est nécessaire, particulièrement pour suivre les recherches et les fuites impossibles des protagonistes. Faussement mécanique, la cinématographie regorge en fait de sens qui, de lents zooms en surcadrages, fait d’un banal village balnéaire une prison terrifiante.


Trois kilomètres jusqu'à la fin du monde, d'Emmanuel Parvu
© September Film

À travers le sort de son personnage, c’est la sclérose de la vieille société patriarcale qui intéresse Pârvu. Tous les pères s’unissent pour sauver les agresseurs du jeune homme et sont prêts à le sacrifier sans vergogne au nom de la foi, de l’honneur, de l’argent ou du confort. À l’inverse, ses deux seules alliées sont des femmes : sa meilleure amie Ilinca (Ingrid Micu-Berescu) et une inspectrice de la Protection de l’enfance.


Parfois difficile à regarder à cause des souffrances d’Adi, Trois kilomètres… touche incroyablement juste. On pourrait trouver ses effets trop littéraux – comme cette ouverture sur une aube naissante – s’il n’avait pas cette simplicité, à la fois sèche et douce. Queer Palm au Festival de Cannes 2024, il dénonce l’homophobie et l’hypocrisie sociale en décortiquant finement la froide raison des bourreaux.


Réalisé par Emanuel Pârvu (Roumanie, 105 minutes) avec Ciprian Chiujdea, Bogdan Dumitrache, Ingrid Micu-Berescu.


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