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Critique : Empire of Light, de Sam Mendes

Dernière mise à jour : 8 mars 2023

Faisceaux de lumière

© Searchlight Pictures

Encore un film sur le cinéma ! Sur un cinéma précisément, l’Empire, situé à Margate, petite ville côtière du sud-est de l’Angleterre. Après un début 2023 marqué par le nostalgique The Fabelmans de Steven Spielberg et le tonitruant Babylon de Damien Chazelle, Sam Mendes nous propose une histoire à échelle plus humaine, mais non moins tragique. Dans Empire of Light, Hilary (Olivia Colman), manageuse à l’Empire, tombe amoureuse de Stephen (Michael Ward), jeune ouvreur nouvellement engagé. Seulement voilà, nous sommes dans l’Angleterre des années 80, Hilary est blanche, Stephen noir et vingt ans les séparent. En toile de fond, des menaces montent : le gouvernement Thatcher met un grand coup de barre à droite, le mouvement des skinheads se convertit à une idéologie fascisante et multiplie les ratonnades et les coups de force racistes…


Après deux James Bond (Skyfall et 007 Spectre) et un film de guerre (1917), Sam Mendes revient à une forme dramatique plus classique : l’action tient d’abord dans les dialogues et les échanges entre ses personnages. Irréprochable au niveau technique, il fait s’envoler le public pendant quelques moments de bravoure (le feu d’artifice, la plage, la manifestation). Sa manière de gérer la narration, soufflant le chaud et le froid, souhaitant visiblement immerger l’audience dans une atmosphère lancinante et douce-amère, plaira ou non. Il lui manque peut-être une sorte d’efficacité, de tension dans le montage… mais telle n’était manifestement pas son intention.


Le charme d’Empire of Light vient en grande partie de l’espace que Sam Mendes ménage pour ses acteurs et actrices. Olivia Colman brille, comme à son habitude, malgré l’écriture de son personnage et de ses troubles psychiques qui flirte parfois avec le cliché ; Michael Ward à l’inverse joue de manière fine, presque discrète, un jeune homme qui doit affronter toute la violence du monde. Mais c’est avec les personnages secondaires et sympathiques interprétés par Toby Jones ou Tom Brooke que l’empathie est la plus vivace. Il faut aussi mentionner l’excellence des choix musicaux, aussi bien les compositions originales du duo Trent Reznor et Atticus Ross que les chansons de Joni Mitchell ou des Specials.


Même si Empire of Light est d’abord une étude de caractères et une description à la fois brutale et poétique d’un amour impossible, le film ne s’empêche pas de décrire le cinéma comme moyen de panser ses blessures. Chez Sam Mendes, la cinéphilie est réparatrice, presque magique. À l’occasion d’une scène qui rappelle très fort le final de Babylon, il convoque un autre long-métrage et vante le cinéma comme une échappatoire, une fenêtre ouverte sur d’autres univers et d’autres merveilles. Un message qui résonne forcément avec les temps présents… sans pour autant nous armer face à eux.




RÉALISÉ PAR : SAM MENDES

AVEC : OLIVIA COLMAN, MICHAEL WARD, TOBY JONES

PAYS : ROYAUME-UNI, ÉTATS-UNIS

DURÉE : 119 MINUTES


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