En toute sincérité
Bonne nouvelle : contrairement à la plupart des films de l’écurie Marvel, celui-ci ne nécessite pas forcément d’avoir vu les 31 autres films de la franchise pour être apprécié. En revanche, mieux vaut avoir de l’affection pour les personnages des Gardiens de la Galaxie avant de lancer les 150 minutes de ce troisième volume, lettre d’amour d’un cinéaste aux personnages qui l’ont propulsé sur le devant de la scène. Après la bonne surprise du premier volet, charmant et pittoresque, et une suite, plus retorse mais toujours euphorique, James Gunn conclut sa trilogie avec un film à grand spectacle qui joue davantage sur l’émotion.
Ceux qui nous étaient vendus en 2014 comme des anti-héros mal assortis sont désormais de sympathiques héros qui n’hésitent pas un seul instant à remuer toute la galaxie pour sauver un des leurs. C’est Rocket, le cynique raton laveur, qui est ici en détresse, propulsant le reste du groupe en direction de son “créateur”, un mégalomaniaque intergalactique obsédé à l’idée de créer une race parfaite à partir de différents animaux. Un prétexte pour dérouler un saisissant bestiaire, mais surtout une manière pour Gunn d’explorer ses thèmes fétiches, entre famille fardeau et famille d’adoption. Même à l’intérieur des grosses machines hollywoodiennes, le réalisateur de Super et The Suicide Squad trouve toujours une manière de revenir à ses marottes, et d’imposer un peu de sa vision.
Là où la plupart des films de super-héros Marvel tournent presque toujours en dérision leur propre mythologie, Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3 va dans le sens inverse, assumant pleinement sa galerie de protagonistes improbables et son univers pop. Vous lèverez peut-être un sourcil devant certains éléments absurdes, mais le film n’a que des yeux émus pour ses personnages, du plus stéréotypé au plus singulier. L’humour pétillant de la saga est toujours là, mais une saisissante sincérité est de mise, qui donne lieu à quelques séquences émouvantes et, parfois, à une overdose de bons sentiments. On sent derrière ce troisième opus un désir de jouer sur ce qui a fonctionné par le passé, sans trop se répéter. Star-Lord, incarné par Chris Pratt, a toujours un casque audio vissé aux oreilles, mais son répertoire ne se limite plus aux années 70, avec quelques titres trop familiers (Creep de Radiohead) et quelques bonnes surprises (Do You Realize ?? des Flaming Lips). Son personnage est d’ailleurs un peu plus en retrait ici - une sage décision, qui permet à d’autres de prendre un peu plus les devants, comme le savoureux duo formé par Pom Klementieff (Mantis) et David Bautista (Drax).
Malgré la patte de son réalisateur (viré puis réengagé par Disney, avant de devenir co-patron des films de DC, la concurrence donc) on ne peut pas vraiment s’y méprendre. Les Gardiens de la Galaxie vol. 3 reste un film Marvel. Ce qui signifie que son univers à la gamme arc-en-ciel est ternie par la colorimétrie sans éclat imposée par le studio. Et que les explosions en tout genre sont plus que jamais de mise, au risque de rendre le spectacle fatigant, même si certaines scènes d'action séduisent par leur panache.
Envisagé par le cinéaste comme une conclusion à la trilogie, ce troisième opus apporte moins de finalité qu’on aurait pu l’imaginer aux aventures des Gardiens. Sans doute le résultat d’un compromis. C’est peut-être James Gunn et ses équipes qui ont donné une vie cinématographique à ces personnages, mais c’est à Marvel que leur avenir appartient.
RÉALISÉ PAR : JAMES GUNN
AVEC : CHRIS PRATT, ZOE SALDANA, DAVID BAUTISTA, KAREN GILLAN
PAYS : ÉTATS-UNIS
DURÉE : 150 MINUTES
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