Les Schtroumpfs : une aventure destinée aux plus petits ?
- Kévin Giraud
- 9 juil.
- 4 min de lecture
Rihanna est la Schtroumpfette, la Schtroumpfette est Rihanna. Deux ans après avoir annoncé en grandes pompes qu’elle prêtait sa voix au personnage iconique de Peyo, la superstar américaine a foulé les marches du Mont des Arts samedi 28 juin 2025 lors de la première mondiale des Schtroumpfs: le film, face à un parterre de fans arrivés aux premières heures de l’aube.C’est sous ces mêmes escaliers que le film, en salles dès le samedi 12 juillet, se dévoilait pour la première fois au public. Surimpressions était dans la salle, et nous avons pu découvrir le nouveau long métrage des Schtroumpfs, cette fois porté à l’écran par les studios Paramount et qui marque la quatrième adaptation cinématographique des aventures des petits lutins bleus.

D’emblée, ces Schtroumpfs cuvée 2025 posent le décor : leur village de champignons caché au coeur d’une forêt a l’air faussement tranquille se transforme rapidement en piste de danse qui n’aurait rien à envier aux plages d’Ibiza ou aux scènes des grands festivals de l’été. Et le Grand Schtroumpf (VF: Gérard Hernandez, VO: John Goodman) de se transformer, pour l’occasion, en DJ des plus aguerris.
Pas le temps cependant de se poser trop de questions : le vénérable chef du village est kidnappé par le maléfique Razamel (VF: François Damiens, VO: J. P. Karliak), frère diabolique – et bien moins maladroit – du sorcier Gargamel. C’est à la Schtroumpfette (VF: Sofia Essaïdi) et à son meilleur ami le Schtroumpf sans nom (VF: Jérôme Commandeur, VO: James Corden) que revient la mission de le retrouver. Une mission qui forcera le duo, accompagné de nombreux autres Schtroumpfs et d’une tortue (?), à quitter leur forêt pour traverser les dimensions et affronter leur destin.

D’aventure trépidante à film frénétique, la frontière est mince. Et ce nouvel opus des Schtroumpfs, s’il parvient à charmer par son esthétique, penche plus souvent vers le bouillonnement d’idées que vers une cohérence capable de capter l’attention des grands comme des petits. Et pourquoi pas, après tout? Signé du réalisateur américain Chris Miller (Shrek le Troisième, Le Chat Potté, à ne pas confondre avec son homonyme à qui l’on doit La Grande aventure Lego et la saga Spider-Verse), les Schtroumpfs semble d’abord et avant tout destiné à une audience jeune, très jeune. Un public qui – toujours selon ce que le film semble penser – s’il n’est pas nourri de péripéties à la pelle et de chansons plus “tiktokables” les unes que les autres, risquerait de s’assoupir.
Distraits et rêveurs, nos bambins? Mais n’est-ce pas justement autour du rêve et de l'émotion que la connexion entre jeunes et moins jeunes pourrait encore se créer? Échouant à transcender cette barrière, Les Schtroumpfs reste, malgré un message sur l’acceptation de soi sincère et teinté de bons sentiments et un rythme effréné, malheureusement assez plat.

Plutôt que de blâmer les petits lutins bleus et leur univers, c’est plutôt du côté de la machine de l’entertainment américain qu’il faut se pencher pour comprendre ce pas de côté. Si les Schtroumpfs ont été pensés comme des héros “de 7 à 77 ans”, selon la maxime consacrée, cette transposition à l’écran par les studios Paramount s’inscrit dans une cible bien plus précise et – à de nombreux égards – restrictive.
Une stratégie que l’on retrouve dans l’ensemble des productions animées du studio, de Sonic à Transformers One (plutôt destinés à un public adolescents/jeunes adultes) en passant par Bob l'Éponge et Pat Patrouille. Passés à la moulinette des IP’s américaines, l’essence de ce qui fait une aventure Schtroumpf disparaît quelque peu, au profit de personnages secondaires plus ou moins intéressants et de références parfois trop appuyées. Là où des studios comme Sony Pictures Animation (Spider-Verse, KPOP: Demon Hunters) ou Pixar réussissent à toucher petits et grands par leurs récits universels, ces Schtroumpfs restent donc désespérément enfantins, et ce ne sont pas les quelques traits d’humour destinés aux adultes qui viendront restaurer cet équilibre.

Les plus âgés se consoleront en contemplant l’animation de ces héros, aux lignes proches de la bande dessinée. Un choix artistique assumé, et une réelle volonté du réalisateur lui-même grand fan du trait de Peyo. Pour peu que vous découvriez le film en version originale, les performances des acteurs secondaires – un casting cinq étoiles incluant John Goodman, Natasha Lyonne, Nick Offerman, Sandra Oh et bien d’autres – réhaussent également le niveau du film, dont les mélodies pourraient presque vous rester en tête tout l’été.Une chose est sûre: si Friend of Mine et les autres chansons originales du film ne deviennent pas des tubes de l’été, elles feront à coup sûr des ravages dans les prochaines fêtes d’école et autres fancy fairs.
Pour ce qui est du film, il faudra attendre l’été pour connaître le verdict des plus jeunes, qui pourraient bien se laisser tenter par cette aventure survitaminée peu digeste. Après tout, n’est-ce pas le propre de l’enfance de savourer la vie – et le cinéma – sans modération ?
Réalisé par Chris Miller ( 92 minutes - États-Unis) avec Rihanna, Nick Offerman, Natasha Lyonne.