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Rencontre avec Chiara Malta & Sébastien Laudenbach, le talentueux duo derrière Linda veut du poulet !

© Dolce Vita Films

Couronné au Festival d’Annecy, en lice pour les César, Linda veut du poulet sera projeté en avant-première à Anima avant une sortie le 6 mars. Rencontre avec le duo derrière ce projet d’animation sublime, pamphlet dédié à la liberté et à la force de l’enfance.


Comment est né ce projet ? 


Chiara Malta : Nous voulions faire un film à destination du grand public, mais aussi un film qui parle d’injustice. On ressent beaucoup d’injustices lorsqu’on est enfant, et lorsqu’elle passe à l’échelle adulte, elle devient injustice sociale, menant à des grèves… Ce film, c’est aussi une œuvre pour réparer. Enfin, c’est un film sur le souvenir, sur la mémoire du goût des choses. 


Linda veut du poulet est un film d'animation, mais vous avez utilisé un procédé de tournage bien particulier. Pouvez-vous nous parler de votre cheminement créatif ?


Chiara Malta : C’est un film qui est très attaché au réel, bien avant que le dessin existe. Cette rencontre entre le scénario et la réalité est importante pour nous, car cela nous aide à écrire une histoire que des comédien·nes pourront ensuite s’approprier. Nous voulions que cette rencontre ait lieu, et cela a été fait via un plateau qui a précédé l’animation, sur lesquels les acteur·ices ont joué le film. Nous avons travaillé entre l’improvisation et la prise de possession du texte, que ce soit pour elle ou pour l’ensemble des comédien·nes adultes d’ailleurs. Mélinée Leclerc (Linda), Clotilde Hesme (Paulette) et Lætitia Dosch (Astrid) ont infiniment apporté au film. Avec la mémoire de tout ceci, nous avons ensuite pu organiser le découpage, le dessin, mais rien n’était figé. Nous n’avons jamais cessé de réécrire le film, et je pense que celui-ci se réécrit encore aujourd'hui dans la tête du public.


Sébastien Laudenbach : L’impulsion du film vient vraiment de ce montage sonore, de cette captation réalisée avec les comédiens. D’habitude, en animation, on commence par un storyboard. Ici, c’est cet élément sonore très riche qui nous a nourri. Il y a d’ailleurs beaucoup d'éléments sonores du film qui viennent de ce premier tournage.


Comment tout ceci s’est-il traduit en images ? 


Chiara Malta : Venant du live, j’avais très rapidement besoin de matériel visuel, de voir mes personnages en action dans une trajectoire et un axe. Sébastien me connaît là-dessus, et il dessine vite, très vite. Donc nous avons très rapidement eu beaucoup de rushs, une balise d’images et de sons qu’il a fallu maîtriser, garder à l’esprit sans en conserver toute la matière. Le film est nourri de ces allers-retours entre mémoire et présent, un thème qu’il aborde également. Pour ce qui est de l’animation, il était essentiel que les personnages existent, qu’ils aient un poids, une existence pour pouvoir transmettre les émotions. Sébastien a été plus loin que ce qu’il avait déjà pu faire dans son film précédent [La jeune fille sans mains, 2016, NDLR], avec l’aide d’une équipe d’animateurs qui ont appris à dessiner d’une certaine manière, à privilégier le mouvement plutôt que la contemplation, à n’aller dans le détail qu’en situation de gros plans. Plus on s’éloigne, plus on va vers l’abstraction. Plus on se rapproche, plus les détails et les visages se révèlent.


Un choix qui se combine parfaitement à l’univers sonore du film.


Chiara Malta : Nous avons été inspirés et stimulés par Erwan Kerzanet et Clément Ducol, qui ont été respectivement chargés du son et de la musique pour Linda. Souvent, on se trouve devant quelque chose de difficilement traduisible. Avec Clément, nous nous sommes compris tout de suite. Certaines animations se sont basées directement sur le rythme de ses musiques, et nous avons pu travailler à partir de celles-ci pour le contexte, dans une perpétuelle réécriture du film comme je le disais plus tôt. 


Linda, malgré son sujet difficile, est une véritable ode à l’enfance et à l’optimisme. C’était votre objectif dès le début ?

 

Sébastien Laudenbach : Nous sommes partis de ce qu’était pour nous l’enfance. L’injustice, le fait de se casser la gueule, de se relever et d’aller de l’avant. Le film est irrigué de cela, et de notre volonté de montrer que les adultes, tout comme les enfants, peuvent être inadaptés au monde, qu’ils ne sont jamais vraiment adultes. L’âge adulte est une espèce de mensonge qu’on nous balance et auquel on veut bien croire quand on est petit, mais il n’arrive pas. Nous sommes tous un peu des enfants, et en ce sens le film s’adresse à tous les âges.

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