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Flashback : Le Bonheur d'Agnès Varda

© Parc Film

Le Bonheur, un titre tout simple, candide, presque niais, qui annonce une certaine douceur, surtout en connaissant la poésie délicate qui imprègne certains films d’Agnès Varda. Dans un premier temps, ce bonheur, la cinéaste s’efforce de le restituer à l’écran : sous sa caméra, une après-midi ensoleillée devient peinture impressionniste où les tournesols et les fougères brillent du même éclat vivifiant, démultipliés par un montage qui en fait autant d’images-clés de la sérénité d’un couple et de leurs enfants. La famille évolue dans cette campagne portée par la partition de Mozart, symbolisant une sorte d’idéal…Mais n’est-ce pas un peu trop ? N’y-a-t-il rien qui entache ce tableau dont la perfection semble un brin forcée ?


Un jour, en effet, François, marié à Thérèse, rencontre Emilie, employée de la Poste. Tout de suite, c’est le coup de foudre. Le père de famille glisse d’époux dévoué à amant déloyal sans l’ombre d’un remord. Varda n'altère pas sa mise en scène et filme l’idylle infidèle avec la même tonalité naïve qui caractérisait son introduction, signe que François trouve autant de bonheur auprès de sa famille, qu’il n’a pas cessé d’aimer, que dans les bras de sa maîtresse. C’est d’ailleurs ce filmage a priori sans condamnation de l’adultère qui fit scandale à la sortie du long-métrage en 1965 et lui valut une interdiction aux moins de dix-huit ans.


Pourtant, l'œuvre est peut-être l’une des plus féministes de Varda. Loin de légitimer le comportement de son protagoniste, elle raconte avant tout le tragique dans le banal. En creux de la béatitude du mari se dessine le malheur de sa femme, et par extension de milliers d’autres, victimes d’un comportement masculin glaçant d’inconséquence. Dans l’épilogue, Thérèse est remplacée par Emilie tandis que la famille retourne à la campagne sous le chant des oiseaux et la symphonie entêtante de Mozart. De quoi couvrir les cris d’une épouse dont les souffrances demeureront sans écho. 


RÉALISÉ PAR : AGNÈS VARDA

AVEC : JEAN-CLAUDE DROUOT, MARIE-FRANCE BOYER

PAYS : FRANÇAIS

DURÉE : 79 MINUTES


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