Left-Handed Girl : un drame familial au travers d'un regard enfantin
- Arthur Bouet
- il y a 13 heures
- 2 min de lecture
Mélange délicat d'humour et de noirceur, ce drame taïwanais met en scène un trio d'actrices criantes de naturel.

En 2004, aux côtés de Sean Baker, dont elle allait devenir la productrice attitrée, Shih-Ching Tsou élaborait Take Out, un long-métrage à l'énergie folle relatant le quotidien difficile d'un immigré chinois clandestin aux États-Unis. 21 ans plus tard, la cinéaste originaire de Taïwan dévoile avec cette première réalisation en solitaire le contrechamp de ce récit migratoire : Left-Handed Girl s'ouvre sur l'arrivée à Taipei d'une famille, de retour au pays après avoir vécu un temps sur le sol américain. Shu-Fen, mère célibataire, monte une échoppe de nourriture sur le marché de nuit tout en élevant I-Ann, sa fille ainée, et I-Jing, sa cadette de cinq ans.
C'est au travers du regard de cette petite fille adorable et espiègle que Shih-Ching Tsou capture l'atmosphère vibrante et électrique des nuits bardées de néons de la capitale. À l'aide d'un iPhone virevoltant et dont le grand angle ratisse large, la cinéaste s'affaire à réenchanter un souvenir lointain par le prisme de l'enfance : « cet endroit est magique », s'écrie I-Jing à la vue des bâtiments lumineux de Taipei.

Conte merveilleux, Left-Handed Girl n'en demeure pas moins un film à l'ancrage social affirmé. La réalisatrice s’attarde sur les difficultés économiques éprouvées par trois générations de femmes, luttant chacune à leur manière pour leur survie. La mère travaille pour éponger les dettes d'hôpital d'un mari qui n'en finit plus de mourir, l'aînée sacrifie ses études pour un boulot dans une boutique tenue par un lâche amant. La petite dernière, elle, met à profit les croyances obscures de son grand-père qui la réprimande durement d'être gauchère. Qu'à cela ne tienne, « la main du Diable » lui servira à commettre de petits larcins pour améliorer l'ordinaire, parachevant le tableau émouvant d'un continuum des solidarités féminines et familiales, servi par un trio d’actrices criantes de naturel.
Avec Janel Tsai, Nina Ye, Shi-Yuan Ma. Taïwan/France, 108 minutes.



